La naissance d’un projet
Au mois de septembre 2020, trente-six élèves d’une classe de seconde du lycée Raoul Follereau ont été conviés par leur professeur de physique-chimie, Monsieur Mourot, à participer à un projet mêlant les sciences et la pratique artistique tout en découvrant l’art contemporain à travers une exposition proposée au Parc Saint Léger de Pougues les Eaux. Initialement, le projet proposé par une jeune artiste, Cécile Renoult, en lien avec Anna Zachmann, chargée des actions de médiation du Parc Saint Léger, était de réaliser des photographies de l’exposition proposée grâce à la technique du sténopé : ce procédé photographique invitant les élèves à prendre un unique cliché, d’un détail ou d’une vue d’ensemble des oeuvres ou de l’architecture du centre d’art lui-même. Les élèves auraient alors participé activement au développement de leurs propres photographies argentiques. Ce projet permettait ainsi d’aborder différentes notions d’optique et de chimie de la classe de seconde de manière plus pratique et plus artistique. Les conditions sanitaires évolutives au cours de cette année scolaire ont contraint l’artiste à modifier les attendus de ce projet tout en abordant une technique proposée par l’enseignant et qui fait la part belle à la chimie, le cyanotype !
Un peu d’histoire et de chimie
Le cyanotype est un procédé photographique ancien mis au point par l’astronome anglais William Herschel en 1842 qui travaillait sur la sensibilité à la lumière des sels de fer. Une feuille de papier ordinaire est badigeonnée d'un mélange de citrate de fer ammoniacal et de ferricyanure de potassium. La feuille est séchée dans l'obscurité avant d'être exposée par contact sous un négatif à la lumière du jour. La lumière transforme le sel ferrique en sel ferreux, le ferricyanure est également transformé en ferrocyanure et précipite avec le sel ferrique pour former une image bleue. Le temps de pose est assez long, l'exposition demandant plusieurs minutes. Après l'exposition, l'image est visible, elle est lavée sous l'eau courante qui dissout les sels non impressionnés par la lumière, un simple lavage de quelques minutes permet de développer et de fixer l’image. Le cyanotype prend sa coloration finale (bleu de Prusse) en s'oxydant à l'air. La botaniste britannique Anna Atkins a été l’une des pionnières dans la réalisation de photographies utilisant les cyanotypes et a réalisé le premier livre illustré de l’histoire avec des photographies en 1953.
Visite de l’exposition « Dérives & Soubresauts »
Lorsque toutes les conditions sanitaires ont été réunies, les élèves de seconde ont enfin pu découvrir le programme qui leur avait été concocté pour cette occasion à la fin du mois de mai. La classe étant répartie en deux groupes, chaque groupe (environ 18 élèves à chaque fois) a pu profiter de l’exposition mise en place au Parc Saint Léger sur deux jours différents avec le questionnement et les commentaires avisés d’Anna Zachmann, la médiatrice du centre d’art pour donner des repères culturels et historiques aux élèves, pour leur permettre de porter un jugement construit et étayé en matière d’art, et de développer leur esprit critique.
L’exposition « Dérives & Soubresauts » était proposée par l’artiste lyonnais Christian Lhopital : cette exposition est constituée de dessins sur les murs réalisés à la poudre de graphite noir avec des scènes imaginaires, parfois ambiguës, espiègles et rieuses et même parfois effrayantes… Ces dessins muraux étaient également associés à des séries de dessins sur papier et d’une structure métallique où l’on peut voir des singes en peluches enduites de peinture blanche suspendues et permettant de nombreuses interprétations. Les élèves ont diversement apprécié l’ensemble de l’exposition, les deux groupes ont été plus moins réceptifs à ce type d’oeuvre contemporaine, la rencontre avec l’oeuvre d’art nous réserve parfois quelques surprises…
Des élèves en pleine création artistique…
Suite à cette découverte de l’art contemporain, une première pour beaucoup d’élèves, Cécile Renoult leur a expliqué ce qu’elle attendait d’eux, réaliser une création artistique en négatif sur plexiglas !
Après avoir détaillé cette technique, les élèves devaient choisir un point de vue afin de représenter en négatif sur une plaque de plexiglas au format A4, avec un feutre noir indélébile, un détail ou une vue plus large d’un élément de l’exposition de Christian Lhopital ou des oeuvres présentes dans le parc Saint Léger ou de l’architecture du centre d’art. Le feutre utilisé impliquait donc des contraintes pour les élèves et le plexiglas leur permettait de lever certaines appréhensions car ils pouvaient s’en servir comme d’un calque en fonction du point de vue choisi. De nombreuses productions ont ainsi pu voir le jour sans que le temps ne soit une contrainte à la création, avec parfois la nécessité de quelques conseils artistiques prodigués par l’artiste Cécile Renoult, pour également « rassurer » certains élèves et favoriser leur expression artistique.
Le Soleil, un élément indispensable dans le processus de création artistique !
Pour prolonger cette création artistique sur plexiglas, les élèves ont alors découvert la technique du cyanotype, mais rien de telle que la pratique pour découvrir tous les paramètres qui peuvent influencer ce type de création : la quantité de réactifs utilisée, la couleur du papier utilisé, l’influence des UV, l’importance du temps d’exposition, la « qualité » du négatif réalisé par chaque élève, l’influence d’éléments extérieurs (comme l’ombre des brins d’herbe), le rinçage…
Les élèves ont ainsi pu réaliser de nombreux essais en étant pris dans un « tourbillon artistique » qui n’avait de limite que l’heure de départ pour le retour au lycée !!
La rencontre avec l’art et les artistes, un élément indispensable dans la formation des élèves
A l’issue d’une année scolaire où les élèves ont été confinés, où ils ont dû se retrouver souvent seuls en distanciel pour aborder des notions nouvelles dans de nombreuses disciplines, une année où les rapports humains ont été « mis entre parenthèses », on s’aperçoit qu’une sortie pédagogique dans le cadre scolaire, dans un lieu dédié à l’art, est un élément primordial dans la formation des élèves. Le centre d’art contemporain de Pougues les Eaux et le parc qui lui est associé est un lieu vital, primordial et essentiel pour que les élèves puissent bénéficier d’un parcours d’éducation artistique et culturelle cohérent de qualité avec l’engagement des collectivités territoriales pour réussir le 100% EAC.
Mise à jour : juin 2021